Avec le nô, le bunraku et le kabuki, le kyōgen est l’une des quatre formes représentatives de l’art théâtral classique japonais. Riche d’une tradition ininterrompue de 600 ans, cette forme de comédie populaire médiévale est apparue dans la région de Kyōto en même temps que le nô, au début du XIVe siècle. Un peu à la manière de la commedia dell’arte en Italie, il s’agissait à l’origine d’une forme improvisée plutôt simple, sans texte ni auteur défini. Puis vers le milieu du XIVe siècle, il est devenu habituel pour les acteurs de nô d’intercaler des scènes de kyōgen entre les cinq pièces de nô. Progressivement, associant ainsi deux formes théâtrales contrastées, l’acteur principal des scènes de kyōgen s’est mis à interpréter le rôle de ai (intervalle comique) au milieu de chaque pièce de nô. Bien que le kyōgen et le nô aient conservé des liens très proches, la popularité grandissante du kyōgen a permis aux représentations indépendantes de se multiplier, notamment en raison de la grande accessibilité de cette forme qui combine intrigue, personnages simples et temps de spectacle courts. Le kyōgen réunit ainsi sans discrimination, sur un plateau qui à l’instar du « carrefour des songes » du théâtre nô, devient le temps d’une représentation le « carrefour d’un rire universel », des personnages réels du Japon d’autrefois (valets et maîtres, petits guerriers et grands aristocrates, moines arrogants et guérisseurs véreux) et des êtres surnaturels (divinités bouddhiques, démons et ogres, esprits animaux). Combinant l’emphase et l’extrême stylisation, le kyōgen nous tend un miroir dans lequel chacun peut reconnaître en lui-même l’indécrottable bêtise de la nature humaine.
Acteur de l’école Izumi, Tadashi Ogasawara, né en 1965, a été formé au kyōgen par Man Nomura, Trésor national vivant du Japon. Il se produit dans les pièces les plus renommées du répertoire et représente le mouvement Man-Kyōgen dans la région de Kansai. Pour cette représentation au musée des Confluences, il sera accompagné sur scène par son fils Hiroaki Ogasawara.